Durablement humanisés ? (15 mai 2020)


Et si le printemps 2020 marquait une étape de réconciliation de l’humanité avec cette fragile nature dont elle fait partie? Quelques indices le font espérer, même si l’on se désole qu’il ait fallu attendre une telle catastrophe sanitaire dont il ne faut pas sous-estimer l’impact nocif.

Dans les relations de chacun avec la « maison commune », ces mois de décélération font surgir l’évidence d’un choix entre folle démesure et sage humilité. Car nous avons goûté un peu partout à une improbable amélioration. Voilà par exemple que de l’immense New Delhi, situé en plaine, on a pu voir l’Himalaya ! En avril, les émissions de dioxyde de carbone de l’Inde ont été de 30% inférieures à celles d’avril 2019. La fermeture des centrales à charbon a provoqué une baisse de la pollution pour la première fois, en près de 40 ans !

Pour ma part, c’est aussi un regard vers le ciel, par beau temps, qui m’a fait goûter une expérience inédite que vous trouverez peut-être dérisoire : zéro zébrure blanche ! Un ciel pur, uni, comme jamais je n’en avais vu depuis des lustres. Pas d’avion ! Et quel silence avec ces routes désertes… Bien sûr, tout cela est aussi le signe de la grave crise économique qui pointe.

Mais je veux souligner ici deux phénomènes corrélés : d’un côté la baisse généralisée de la frénésie humaine imposée par le confinement ; de l’autre l’ouverture à la contemplation proposée par ce même confinement.

Ceux qui ont eu la chance d’avoir vue sur du vert ont eu le loisir de suivre au jour le jour l’explosion de la nature, l’éclosion printanière de la vie ! On nous a dit un peu partout : « La nature reprend ses droits. » Mais n’est-ce pas tout autant nous qui avons retrouvé une disponibilité, peut-être un goût, pour la nature ? Le silence a permis d’écouter à toute heure le chant des oiseaux, il est vrai enclins à s’approprier l’espace public délaissé par l’homme.

Je ne nie pas l’effondrement de la biodiversité lié à la pollution. Mais constatons qu’il s’accompagnait d’un effondrement de notre acuité à percevoir la vie. Faute d’attention, de patience, de calme. L’immobilité forcée – je l’ai vérifié avec mes amis porteurs de handicap – s’accompagne souvent d’un regard plus affûté sur tout ce qui est en mouvement à l’extérieur. Perception accrue des paysages avec tous leurs occupants, mais aussi des visages humains, avec tout ce qu’ils révèlent de la vie intérieure. Plus reliés à la nature, nous devenons plus humains.

Je reste avec une question : ces deux mois nous auront-ils durablement humanisés ?

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