« Et les Mistrals gagnants » : Saint esprit d’enfance

La sortie en salles du magnifique documentaire Et les mistrals gagnants d’Anne-Dauphine Julliand offre à Tugdual Derville une occasion de s’émerveiller de la philosophie des enfants.

MG
Quand Jésus place un enfant au milieu de ses disciples, est-ce seulement sa confiance ou son insouciance qu’il donne en exemple  ? Ne serait-ce pas aussi son art de vivre, voire sa philosophie  ? Ceux qui côtoient des petits enfants entendent souvent la vérité sortir d’une bouche innocente. Voilà un petit garçon de trois ans  : il joue aux Lego à l’écart de ses parents qui regardent, dans la même pièce, un film sur la vie du Christ. Arrive la question de Pilate  : «  Qu’est-ce que la vérité  ?  » L’enfant interrompt sa construction et répond doctement  : « C’est l’esprit de Dieu…  » Puis recommence à jouer, comme s’il ne s’était rien passé.

Saint esprit d’enfance. Esprit simple. Esprit sain… Qui plus est quand le corps est malade  ? Grâce à une avant-première, j’ai vu le documentaire Et les mistrals gagnants qui sort le 1er février. J’en suis resté inondé de bonheur. On ne peut oublier le livre publié en 2013 par Anne-Dauphine Julliand, Deux petits pas sur le sable mouillé (Les Arènes). C’était son témoignage personnel, l’histoire de sa petite fille Thaïs qui vécut quelques années d’ombres et de lumière, dans l’amour, au milieu des siens, avant d’être emportée par une maladie évolutive, accompagnée chez elle, jusqu’au bout. Je me souviens d’un mot de son frère  : «  C’est pas grave la mort. C’est triste mais c’est pas grave.  » Cette fois, Anne-Dauphine est partie à la rencontre d’enfants gravement malades. La réalisatrice filme à leur hauteur, suit leurs jeux, enregistre leurs conversations, leurs mots et leurs maux. Elle nous donne à voir cinq de ces gamins-philosophes. Chacun traverse l’épreuve de la maladie sans rien perdre de sa joie. Ils me font penser à ces jeunes d’à Bras Ouverts qui nous apprennent à sortir de la frénésie de l’efficacité pour goûter le présent d’éternité.

Alors que la foi n’est évoquée que par l’image discrète d’une des familles en prière, ce reportage fera grandir l’âme de tout spectateur. On s’attache à Charles, Camille, Imad, Ambre et Tugdual. Rien des grands sujets dans lesquels s’empêtrent nos contemporains ne leur est étranger  : la vie, la mort, la souffrance, le deuil, le bonheur… Assis au milieu des fleurs, ou dans leur chambre d’hôpital, ils expliquent tranquillement que RIEN ne peut empêcher le bonheur. Ni la vie, ni la mort… On croirait lire saint Paul. Tous sont ancrés dans la sagesse éternelle. Au travers de ces histoires vraies, à la fois graves et souvent drôles, Anne-Dauphine Julliand nous offre une leçon de vie  : le bonheur est compatible avec l’épreuve. C’est le message vital qu’elle porte au monde ; on le sent mûri dans ses entrailles.

Dans une société tentée par l’anesthésie générale, où tant d’adultes croient qu’il faut éradiquer toute souffrance pour être heureux, jusqu’à provoquer la mort pour la supporter, il est bon de voir vivre des enfants fragiles, capables de jouer tout en affrontant bravement les contraintes inhérentes à leurs lourdes pathologies. Pas d’angélisme  : ils pleurent s’il le faut, mais ils rient tout aussi naturellement. Dans un même élan vital, chacun exprime tour à tour son besoin de consolation et sa capacité de consoler. Aucun ne s’enferme dans sa tristesse  : la vie est plus forte que la fatalité.

Saisi de joie en présence de l’Esprit Saint, Jésus a remercié le Père que soit révélé aux tout-petits ce qui reste caché aux «  sages  » et aux «  intelligents  ». La sagesse éternelle, c’est donc l’esprit d’enfance.

 

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