Élection modèle ?

sixtineLe mode d’élection des papes est marqué par une spécificité : l’absence de candidat. De nombreuses institutions pourraient avantageusement s’en inspirer.

Quelle économie d’énergie – et de conflits stériles – fait l’Église en n’obligeant aucun cardinal à se déclarer ! Cette particularité a beau alimenter les rumeurs du Monde autour des « papabile », elle est d’abord le signe de la maturité du processus électif.

On glose volontiers sur les discussions qui préparent le conclave ; on les dira « de couloirs », pour leur conférer une tonalité péjorative, comme s’il ne s’agissait que de manipuler par avance le processus. En réalité, ne permettent-elles pas à chaque cardinal de creuser en son âme et conscience ce dont l’Église a aujourd’hui besoin ? A Rome, mais aussi à partir de Rome grâce au téléphone, chacun peut consulter ceux dont l’avis compte pour lui.

Pour chaque électeur, il ne s’agit pas encore – ou pas seulement – de débattre de telle ou telle personnalité, mais d’embrasser l’Église universelle afin d’ajuster son regard aux enjeux de notre temps. Les rencontres préliminaires entre cardinaux, ces « congrégations » qui s’ouvrent actuellement, sont aussi l’occasion, pour le futur corps électoral, de faire… corps. Écouter chacun, dans des échanges bilatéraux ou multilatéraux, c’est se donner la chance d’épouser son regard, sa culture, ses préoccupations.

Cela donne aussi la chance de mieux découvrir la personnalité qui se prépare, à son insu, à l’immense charge. Car le moment venu, l’un d’entre eux devra, non pas vaincre mais consentir. Et ce n’est pas le moindre des avantages d’un système qui exclut tout idée de candidature : l’élu se sentira porté, non par sa propre appréciation de lui-même, mais par la confiance de ses pairs, relais indispensables de l’appel de Dieu. Ce que réclame avant tout le service de l’Église, n’est-ce pas l’humilité ?

Certains observateurs habitués aux combats de coqs politiques ont visiblement du mal à imaginer qu’un cardinal puisse avoir la Foi, au point de subordonner son intuition personnelle, sa réflexion, voire son désir, à la grâce collective du conclave. Encore moins à croire que c’est l’Esprit qui s’exprime quand s’assemblent ceux qui l’implorent.

Pourtant, les mondes associatif ou politique, voire celui l’entreprise, devraient à mes yeux prendre exemple sur l’Église catholique quand il s’agit de désigner leurs chefs : prendre le temps de consulter largement, pour ensuite se réunir à huis clos, débattre le temps qu’il faut, puis voter en son âme et conscience, librement, à bulletin secret, jusqu’à une majorité qualifiée… C’est une pratique dont j’ai fait l’expérience dans plusieurs associations. Elle est gage d’une unité d’une telle force qu’on peut la nommer communion.

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